Le Mutisme de la Gauche sénégalaise sur la Candidature de Macky Sall: Légalisme, Réalisme ou Abdication .

La gauche sénégalaise a été une pièce maîtresse dans les combats qui ont mené le pays à l’indépendance. Son rôle a aussi été déterminant dans la première alternance politique de 2000, qui a mis fin aux 40 ans de gestion du Parti socialiste de Senghor à Abdou Diouf, ainsi que la seconde alternance de 2012 qui a porté le candidat Macky Sall au pouvoir. Il serait pratiquement impossible de relater ici, les hauts faits d’arme de la gauche sénégalaise, depuis l’avènement du Parti africain de l’indépendance (PAI) en 1957. La contribution de ce parti historique dans la sensibilisation et l’éveil des masses populaires, est un pan important de l’histoire politique de ce pays. C’est à la faveur de l’ouverture démocratique, et surtout du multipartisme intégral qui est intervenu avec l’avènement de Abdou Diouf au pouvoir en 1981, que ces partis PIT, LD, And Jeff et d’autres qui sont nés des flancs du PAI originel, et qui avaient migré de la clandestinité à la semi-clandestinité, ont été finalement reconnu comme des partis légalement constitués. Mais depuis lors jusqu’à récemment, ces formations politiques ont été de tous les combats pour l’émancipation, le progrès, et à l’avant-garde de toutes les batailles démocratiques dans ce pays. Ils sont également reconnus pour leur rôle dans l’encadrement et la formation de leurs militants. Mais aussi à travers leur grande capacité d’organisation et leur expertise dans les stratègies et tactiques politiques. Sans ignorer leur bonne lecture du jeu politique, et leur intelligence des contextes, des enjeux et des défis de l’heure. C’est cette posture de lucidité et de responsabilité qui est encore et toujours attendue de ces partis de gauche, au vu de ce qu’ils représentent symboliquement sur l’échiquier politique national. On apprend pas d’ailleurs aux gens de la gauche, que l’hégémonie n’est pas une question de nombre. Et que la force des idées est de loin supérieure à toutes ces manigances, subterfuges ou calculs de bas étage qui ne reposent sur rien et ne mènent nulle part. Donc l’essentiel serait qu’ils se déterminent au moins, à travers une grande clarté et une objectivité exquise sur cette question de mandature qui agite le pays, pour permettre aux Sénégalais, de mieux comprendre où se trouve l’intérêt du Sénégal. Ces partis qui ne semblent pas perdre leur courage politique, ne s’étaient-ils pas déjà manifestés après les Locales et les Législatives de 2022, pour faire comprendre à la mouvance présidentielle qui est leur cadre politique élargi, que la tendance baissière qui est constatée au niveau de leur électorat, est un deuxième signal en direction de la Présidentielle de 2024? La gauche sénégalaise n’est-elle pas finalement confrontée, plus que jamais à la question fatidique de Shakespeare, « être ou ne pas être »? Il s’agit ici de dire, « être ou ne pas être » pour la candidature du Président Macky Sall en 2024. A moins que ces partis se disent, nous sommes légalistes et on attend la décision du Conseil constitutionnel, qui est la seule instance qui est habilitée à dire le droit sur cette question. Et dans ce cas ils auront la lattitude d’affirmer, que Macky Macky Sall n’a encore rien dit à propos de sa candidature, donc on ne peut pour le moment s’y prononcer. En faisant fi bien sûr de cette capacité d’anticipation qui a toujours été l’une des forces motrices de ces appareils politiques dits de gauche. On se rappelle en tout cas de la position de la gauche en 2012, lorsqu’il s’était agi de rejeter systématiquement la candidature du Président Abdoulaye Wade. Il revient encore, à cette même gauche, de s’exprimer sans détours sur la situation actuelle du pays, et sur les éventuels blocages et les incertitudes qui ne sont pas à exclure dans le contexte actuel du pays. C’est feu le philosophe et homme politique Sémou Pathé Gueye qui disait qu’un leader qui a peur d’être impopulaire à cause de ses positions politiques ne mérite pas cette appellation. Mais ce qui peut gêner la gauche qui est en compagnonnage avec le Président Macky Sall, n’est-il pas que c’est lui-même, Macky Sall qui a dit à maintes reprises, par l’oralité et par l’écriture, sur plusieurs tribunes et devant moult auditoires qu’il est à son dernier mandat? La gauche sénégalaise peut ainsi être confrontée à un dilemme cornélien. Car si on quitte le terrain des principes et des valeurs, il ne restera plus rien à la gauche. Il est encore vrai que cette belle période de la gauche, telle que nous l’avions connue n’est plus, et qu’entre-temps beaucoup d’eau a coulé sous le pont de la vieille Ville de Saint-Louis. C’est le visionnaire politique Seydou Cissokho qui avait défendu en son temps, avec la brillance qu’on lui connaissait que « l’avant-gardisme ne se proclame pas. Qu’il est une attitude qui se prouve dans les faits, constamment et tous les jours ».Babacar Papis Samba- Auteur et Adepte de la pensée complexe.